Interview d'Henry G. Weller, OpenCFD Ltd.
Les développeurs du logiciel FOAM (Field Operation And Manipulation), qui permet de simuler l'écoulement d'un fluide (autour d'une automobile, par exemple), ont choisi de diffuser leur produit sous licence libre. Baptisé OpenFOAM, ce projet est proposé sous licence GPL (General Public License).
Le créateur, Henry Weller, a fondé la société OpenCFD en 2004. Elle vend de la consultance et du support sur le logiciel OpenFOAM. Cette initiative est particulièrement intéressante, compte tenu du caractère très spécialisé du logiciel libéré. La constitution d'une communauté possédant la taille critique suffisante n'est en effet pas triviale*. LogicielLibre.Net a donc interviewé Henry Weller afin d'en savoir plus.
OpenFoam est un logiciel spécialisé, si bien qu'il semble difficile de créer une communauté active. Quelles étaient vos attentes lorsque vous avez publié OpenFoam ?
Il semble qu'il ne soit pas difficile de créer une communauté active. Le site de discussion est très occupé et récolte environ 5 nouveaux enregistrements par jours. Je pense que nous approchons les 200 utilisateurs (principalement académiques) et cela augmente rapidement. Le problème est d'organiser et de financer une organisation de support qui soit durable. Nous avons créé OpenCFD dans ce but mais nous n'avons actuellement pas de revenus et devons contribuer à OpenFOAM sur notre temps libre. Cette voie n'est clairement pas soutenable étant donné la rapide croissance de la demande.
Est-ce que le retour de la communauté correspond à vos attentes ?
Nous avons obtenus quelques retours sous la forme de contributions de code, d'études de cas, de demandes d'aide de débutants,... Par contre, nous n'avons pas eu de retour financier.
Vos clients trouvent-ils un bénéfice dans l'Open Source ?
Oui, énormément. OpenFOAM n'est pas de manière prédominante un ensemble d'applications soigneusement packagé (bien qu'il comprenne beaucoup d'applications complètes et utiles). Il est prévu pour être utilisé comme boîte à outils de développement CFD, de sorte que les utilisateurs puissent le mettre en application quelques soient les physiques complexes nécessaires pour résoudre leur problème. Ceci est beaucoup plus difficile avec des codes commerciaux diffusés sous la forme d'une boîte noire (black-box), donnant seulement un accès limité aux sources.
Cette publication a-t-elle été un moteur pour de nouveaux partenariats (avec des universités, par exemple) ?
Pas particulièrement, non. Nous ne fonctionnons pas depuis longtemps en tant qu'organisation commerciale et ne bénéficions pas directement de développements ou de partenariats. Nous travaillons sur OpenFOAM directement pour le bénéfice des utilisateurs.
Quelle est la part des revenus résultant des licences et des services dans votre secteur d'activités ?
Actuellement, OpenCFD n'a pas de revenus.
La publication d'un logiciel sous licence Open Source signifie la perte de revenus issus de la vente de licences, en particulier pour les logiciels spécialisés. Etes-vous d'accord avec cette affirmation ?
Bien sûr, nous ne pouvons pas faire d'argent en vendant des licences. Cependant, nous serions capables de vendre du support comme des développements spécialisés.
Et comment imaginez-vous le modèle d'affaires d'OpenCFD ?
Nous espérons fonctionner par la vente de support et services, en particulier des développements payés directement par une organisation sponsor. Nabla (notre précédente entreprise) a un petit nombre de contrats de support avec des universités qui seront transférés à court terme vers OpenCFD. Nous espérons accroître le nombre de ces contrats. Nous négocions aussi quelques contrats de support et de développement avec des entreprises et des consultants qui utilisent beaucoup la CFD et sont intéressés par la liberté obtenue en utilisant OpenFOAM. Nous pensons que la meilleure approche pour financer le support des universités serait d'obtenir un patronage de la part des organes de financement des universités. Un nombre beaucoup plus grand de contrats pourrait être négocié pour couvrir toutes les organisations financées par cet organe. Nous ne sommes pas sûr que cela soit possible parce que cette approche n'est probablement pas couverte par les procédures standards de ces organisations. Nous approfondissons cependant la question.
Interview d'Henry G. Weller, OpenCFD Ltd. (http://www.OpenCFD.co.uk)
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* LogicielLibre.Net avait déjà réfléchi à un cas similaire en 2003 : "Mon entreprise édite un logiciel de prévisions météorologiques. Plusieurs clients et centres de recherche universitaires ont proposé leur participation active aux développements. La liberté d'un tel logiciel peut-elle conduire à un modèle économique viable ?".
L'interview a été réalisée en anglais et par courriel le 24 janvier 2004.
Posté le 1er mars 2005.
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